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nouveau poème

Chers amis,

Chers amis,

voici mon nouveau poème tout récent.

Merci beaucoup pour votre fidélité,

En Christ, notre Seigneur

MA PLÉNITUDE

Oui, mon Amour, tu es ma Plénitude
Et mon Mystère et ma Certitude ;
Mon flot intarissable de tendresse,
Ma Paix, mon Bouclier, mon Allegresse..

Tu es ce feu ardent, inextinguible
Tu es ma Source, Créateur incorruptible,
C’est Toi qui me submerges de Ton Être infini !
Oui, mon Amour, c’est Toi qui me nourris et me bénis !

Toi, notre véritable Vie, Vie éternelle ,
Toi, notre Père à l’étreinte maternelle,
Toi, notre Dieu et notre joie ;
Je T’aime, mon Seigneur, et me prosterne devant Toi !

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Joyeux Noël

Chers amis,

de tout coeur je vous souhaite un saint et lumineux Noël empli d’Amour et de Grâce de notre Seigneur!

Qu’à part des cadeaux matériels on puisse partager des cadeaux spirituels!

Quant à moi, pour ce Noël Dieu m’a fait un cadeau magnifique: je suis devenue organiste titulaire de l’église Saint Paul, alleluia!

Donc, je serais très heureuse de vous voir et de vous jouer live de la très belle musique!

À bientôt!

 

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LINCEUL DE TURIN

LINCEUL DE TURIN

Linceul 5      LINCEUL 1      LINCEUL 3   Linceul entier

De profundis… Des profondeurs des siècles la Sainte Face de Jésus – Fils de Dieu vivant nous appelle à croire en Lui, en Son Mystère, Mystère de Sa mort et de Sa résurrection.

C’est précisement au moment de Sa résurrection qu’Il nous a laissé une impreinte miraculeuse de Son très Saint Corps sur le linge funéraire qui l’enveloppait pendant 36 heures après Sa crucifixion.

Cette impreinte est non déformée malgré les lois naturelles auxquelles elle aurait dû obéir normallement en suivant les replis du linceul..

Cinquème Évangile – c’est comme cela qu’on l’appelle souvent, car toute la Passion de Jésus s’y est imprimée dans le moindre détail.. Chaque blessure, chaque meurtrissure, correspond exactement aux descriptions évangéliques..

Ce Visage meurtri, endolori, mais noble et glorieux nous magnétise par sa majesté divine, impassibilité et humilité.

La Sainte Face du Linceul est devenue le prototype des icônes du Christ.

Sur la très célèbre icône de la Trinité d’André Roublev, c’est Sa Sainte Face, la Sainte Face du Linceul, que le Christ voit se mirer dans la coupe (l’ange à notre droite).

Vous trouverez ci-dessous le résumé du chapitre sur le Linceul de Turin du livre de Jean-Maurice CLERCQ – médecin, membre du Conseil Scientifique du Centre International d’études sur le Linceul de Turin.

Chargée d’informations scientifiques et de preuves d’authenticité concordant avec les récits évangéliques cette relique est le grand témoin silencieux de la Passion, de la mort et de la Résurrection du Christ.

Jean-Maurice CLERCQ

« LES GRANDES RELIQUES DU CHRIST »

La tunique d’Argenteuil

Le Suaire d’Oviedo

Le Linceul de Turin

Synthèse et concordances des dernières études scientifiques

François-Xavier de Guilbert

3, rue Jean-François-Gerbillon, 75006 Paris, 2007

ISBN : 2-7554-0075-7

PRÉSENTATION

L’authenticité historique de Jésus de Nazareth n’est plus un fait contesté de nos jours, tant les découvertes archéologiues confirment les évangiles, même si ceux-ci ne sont pas considérés au sens de reportages vécus, mais plutôt comme le récit de « témoins » de la mission de Jésus.

Pour les chrétiens, les Évangiles sont bien plus qu’un témoignage : ils sont le fondement de leur foi en Dieu et en Jésus, le Messie incarné promis dans l’Ancien Testament dont il réalise les prophéties, la Parole de Dieu qui s’est inscrit en chair et en sang dans notre humanité.

Jésus a vécu environ 33 ans avant d’être crucifié et de ressusciter le troisième jour après sa mort, après avoir annoncé pendant trois années le royaume de Dieu. Si la matérialité de sa Passion, dans l’ensemble, n’est plus tellement contestée par les agnostiques, il n’en est pas de même pour sa Résurrection. C’est, évidemment, un fait extraordinaire impossible qui dérange et heurte l’esprit rationnel.

Cependant, cette Résurrection qui est devenue la pierre d’angle de la foi chrétienne demeure encore la pierre d’achoppement, signe de contradiction avec la vision rationaliste de notre époque.

En faisant intrusion dans notre histoire, Jésus a vécu comme un homme. Il a partagé en tout notre condition humaine : il a eu faim et froid et partagé nos sentiments d’affection, de joie et de peine ainsi que nos souffrances.

De la présence historique de Jésus, nous sont restés des témoins matériels personnels, en particulier des vêtements et des linges funéraires de sa Passion qui ont été pieusement conservés par ses disciples, témoins de sa crucifiction, et qui ont traversé les siècles pour parvenir jusqu’à nous.

La vénération de ces reliques ne peut que conforter notre foi personnelle et même la fortifier. C’est en ce sens que l’Église catholique, avec prudence, a toujours encouragé ces dévotions, souvent d’ailleurs, ne faisant que suivre ou confirmer une dévotion populaire déjà existante.

Bien que la foi soit le résultat d’une démarche et d’une adhésion du coeur avant celle de l’intelligence rationnelle, il n’en demeure pas moins que la connaissance critique des reliques que l’on vénère reste un devoir qu’il faut savoir accepter et assumer. Il est donc normal de soumettre à des examens scientifiques les reliques que l’Église possède, de façon à pouvoir rejeter les fausses reliques et à conforter les vraies.

Si les chrétiens partent en pélerinage à travers le monde pour aller sur les lieux où Notre-Dame a posé le pied sur notre terre comme à Lourdes ou Fatima, ou pour mettre leurs pas dans ceux de Jésus en Terre Sainte, combien plus de chrétiens se doivent de respecter et de vénerer les reliques ayant trait au Christ. Et lorsque ces reliques sont encore entachées de sang de Notre Seigneur, ne prennent-elles pas un sens encore plus sacré ? Nous nous trouvons encore en présence de traces physiques de Jésus, d’une manière bien réelle mais différente de celles du pain et du vin consacrés lors de la Divine Liturgie qui sont devenus le corps et le sang du Sauveur, actualisation du sacrifice de Jésus sur la croix. C’est la permanence bénie des traces sanglantes de l’intrusion du monde divin dans le monde humain, du spirituel dans le temporel.

Ne serait-il pas alors du devoir du chrétien d’aller honorer les reliques du Sauveur qui gardent encore matériellement le témoignage sanglant de sa Passion ?

Mais encore faut-il que le croyant ait aussi la connaissance de « ce reste de la présence physique » du Christ et soit persuadé de leur authenticité.

Nous avons l’intime conviction que si ces reliques, encore maculées du sang de la Passion de Jésus, sont parvenues jusqu’à nous pour être étudiées au crible des spécialistes scientifiques, c’est que le Seigneur, dans son infinie bonté, nous a fait ce don à dessein spécialement pour ce temps présent si fortement emprunt de matérialisme.

De nos jours, trois reliques majeures sont attribuées scientifiquement à la Passion de Jésus. Il s’agit du Linceul de Turin (Italie), de loin le plus connu et le plus étudié car c’est un linge éminemment énigmatique, du Suaire d’Oviedo (Espagne) qui commence à être connu grâce aux études scientifiques menées depuis 1989, et enfin de la Sainte Tunique d’Argenteuil (France) dont les investigations scientifiques récentes viennent d’avancer à grands pas.

Ces trois reliques portent la totalité des traces de la Passion du Christ, de Gethsémani à la Résurrection.

– La Sainte Tunique d’Argenteuil : linge de corps porté par le Christ durant sa Passion, c’est la tunique sans couture qui a été tirée au sort par les soldats au pied de la croix. Il porte des traces de sang provenant de la sueur de sang de Gethsémani, de la flagellation et du portement de croix.

-Le Suaire d’Oviedo : linge de la taille d’une serviette qui a été posé sur la tête de Jésus encore en croix aussitôt après le coup de lance pour n’être retiré que lors de la mise au tombeau. Il porte des traces d’écoulements ensanglantés importants provenant des poumons, traces traumatiques issues de la flagellation et de la crucifiction : ces écoulements confirment la mort du Sauveur.

-Le Linceul de Turin : linge funéraire qui enveloppa le cadavre de Jésus pendant 36 heures. À lui seul, il récapitule « en images » la Passion (agonie, flagellation, couronnement d’épines, portement de la croix, crucifiction, coup de lance porté au coeur), la mort et, ce qui et le plus important, la Résurrection par le mystère des images du Sauveur contenues sur la toile.

Aujourd’hui, devant l’accumulation de tant d’informations scientifiques et de tant de preuves d’authenticité, le moment est venu de montrer les points de convergence scientifique que ces trois reliques possèdent entre elles et de les confronter avec les connaissances médicales relatives à la Passion et aux écrits évangéliques.

***

Cependant, dans tout ce cortège d’éléments scientifiques affirmant l’authenticité des trois reliques, il en est un en défaveur de leur authenticité : la datation des linges par le Carbone 14 qui donne toujours une date éronnée avec constance, ce qui finit par poser question pour une raison fort simple : ces trois linges ayant été en contact avec une seule et même personne devraient présenter le même âge radiocarbone… mais dans les faits, chaque lige est daté à une période historique différente. C’est un contresens éminemment important, une contradiction interne décrédibilisant la technique de datation par le Carbone 14, ce que les laboratoires de radiocarbone n’ont pas pu ou non pas voulu aborder. Nous reviendrons plus en détail sur ce sujet.

LE LINCEUL DE TURIN

Le Linceul de Turin (Italie) : linge funéraire qui enveloppa le cadavre de Jésus pendant 36 heures. À lui seul, il récapitule « en images » la Passion (agonie, flagellation, couronnement d’épines, portement de la croix, crucifiction, coup de lance porté au coeur), la mort et, ce qui est le plus important, la Résurrection, par le mystère du corps supplicié « imprimé » en négatif sur la toile.

Voilà pourquoi le linceul de Turin est souvent appelé : « Le 5ème évangile ».

« Pierre… entra dans le tombeau et considéra le linceul posé là et le linge qui avait recouvert la tête… il était roulé à part dans un autre endroit. » (Jn 20, 6-7)

« C’est alors que l’autre disciple… entra à son tour dans le tombeau ; il vit et il crut. En effet, ils avaient pas encore compris l’Écriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts. » (Jn 20, 8-9)

CONNAISSANCES SCIENTIFIQUES ACQUISES

Souvent désignée à tort, « Suaire », le Linceul de Turin jouit d’une grande popularité auprès des chrétiens en particulier grâce à la diffusion des images de la Sainte Face.

De ce fait, nous allons essayer de donner l’information la plus complète possible afin que le lecteur puisse percevoir combien elle est extraordinaire, unique et mystérieuse et aussi combien elle nous a fait pénétrer dans le mystère de la résurrection du Seigneur par ses énigmes.

Ce linge mesure environ 1,10 m de large sur 4,30 m de long. Depuis toujours il est considéré comme le drap mortuaire de Jésus-Christ dans lequel il a été enseveli au tombeau. Il présente la particularité unique de montrer deux images mystérieuses se rejoignant par la tête, l’une de face et l’autre de dos, d’un homme d’une taille d’un mètre soixante-dix-huit qui a été flagellé et crucifié à l’époque romaine, conformément à la description évngélique. Les études nous ont appris que ces images étaient en fait une sorte de cliché négatif photographique avec effet de relief.

L’histoire

Les premières traces historiques confinent peut-être à la légende au sujet du linge funéraire du Christ. Entre l’an 33 et 54, le disciple Taddée aurait présenté le Linceul au roi Abgar, dont le royaume se situait au nord de la Palestine. Malade, il aurait été guéri à son contact. Il aurait alors protégé les premières communautés chrétiennes. Mais son fils qui lui succéda en l’an 57, entreprit de persécuter les chrétiens et le Linceul fut caché. Il disparut alors de l’histoire pour ne réapparaître que quatre siècles plus tard.

Les premières certitudes historiques commencent en l’an 525, à la suite d’inondations catastrophiques de l’Euphrate qui ont fait quelque 30 000 victimes par noyade dans la ville d’Edesse (Turquie orientale). Au cours de la restauration des murailles endommagées, on découvrit la relique dans une niche qui avait été camouflée au-dessus de la porte ouest des remparts de la ville. Reconnue aussitôt comme authentique par les Byzantins, l’étrange image du Christ a été qualifiée d’  « archeiropoïetos », c’est-à-dire « non fait de main d’homme » et sera connue sous le nom de « Mandylion ».

Peu après, l’image de la sainte Face de l’Homme du Linceul servit de règle (canons) artistique dans ses proportions pour représenter le visage du Christ tel qu’on le connaît dans la tradition des icônes.

L’ histoire de la genèse de l’hymne Acathiste se trouve mêlée avec celle du Mandylion. En 626 les peuples barbares de la rive sud du Danube attaquent Constantinople. Le patriarche Serge, après avoir exhorté le peuple à ne pas se laisser abbatre mais à mettre leur espérance dans le Christ et en Sa Sainte Mère, décide de porter en procéssion sur les remparts de la capitale l’icône de la Mère de Dieu et l’icône « non faite de main d’homme » (c’est-à-dire le Linceul plié de manière à bien voir la sainte Face) ainsi que le vêtement de la Mère de Dieu pour implorer leur protection. Une tempête aussi soudaine que violente s’éleva et détruisit les embarcations ennemies. En reconaissance de cette victoire miraculeuse, le peuple chanta toute la nuit les louanges à la « Panaghia » ( la « Toute Sainte », épithète byzantine usuelle de la Mère de Dieu) sans s’asseoir (Acathiste) puisqu’elle n’avait pas cessé de veiller sur eux. Depuis cette année-là, l’Église byzantine, en souvenir de ce prodige, célèbre l’Hymne Acathiste de sa « très sainte Souveraine, la Mère de Dieu et toujours Vierge Marie » le samedi de la cinquième semaine de Carême.

Puis le Mandlion regagna la ville d’Edesse. Une basilique Sainte-Sophie est construite pour servir de sanctuaire à la relique et accueillir les nombreux pélerins. Parallèlement à l’édification de la basilique d’Edesse, à Constantinople sera construite « la grande Sainte-Sophie » (532 à 537).

Mais l’islam étendant ses conquètes, la ville d’Edesse tomba entre les mains des Perses musulmans en 638. Cependant la relique continuera d’être honorée et les chrétiens seront respectés dans cette ville par l’Islam.

En 692, l’empereur byzantin, Justinianus II convoque un concile complémentaire au 6e Concile oecuménique de Constantinople (680-681) orienté sur les problèmes dogmatiques. Parmi les canons disciplinaires qui furent promulgués, le canon 82 affirme : « nous décidons que dorénavant sur les icônes, à la place de l’ancien Agneau seront peints les traits humains du Christ qui a pris sur lui tous les péchés du monde ». Ce canon fut à l’origine des Icônes représentant le buste du Christ dont les proportions de la tête étaient calquées sur celle de la Sainte Face du Linceul. À partir de cette époque, à chaque fois qu’un événement allait concerner le Linceul, des pièces de monnaie étaient frappées portant l’effigie du buste du Christ (y compris après sa réapparition en 1357 et jusqu’à la chute de l’empire bysantin en 1453).

À cette époque, l’empire byzantin, issu du viel impire romain d’Orient, représentait le monde chrétien oriental et rivalisait avec Rome. Au cours des siècles, les empereurs byzantins étaient de « grands collectionneurs » de reliques et essayaient de recueillir toutes les reliques du monde chrétien pour en rehausser leur prestige et les mettre à l’abri de l’islam. Aussi n’auront-ils de cesse que de récupérer la relique la plus importante pour les chrétiens : Le Linceul du Christ. Ainsi, en 943 l’empereur byzantin Romanus fit le sultan remettre le Mandylion-Linceul.

Le Linceul arriva avec tous les honneurs à Constantinople où il sera processionné dans la plus grande ferveur le 15 août 944. De cette fabuleuse journée, il nous restera l’homélie prononcée par Grégoire le référendaire le lendemain dans la basilique Sainte Sophie ainsi qu’in manuscrit « chronique byzantine » du début de XIVe, montrant dans une miniature l’arrivée du Mandylion-Linceul à Constantinople où l’on voit l’empereur baiser la Sainte Face, partie visible du linceul replié. Par la suite, il sera présenté régulièrement à la ferveur religieuse des fidèles, en particulier le vendredi saint, jusqu’en 1204, comme l’attestent de nombreux témoignages.

En 1180, lors de la croisade levée par le pape Alexandre III, le roi de France Louis VII, en chemin vers la Palestine, vint se recueillir devant le Linceul en passant par Constantinople à l’occasion du mariage de sa fille Agnès (8 ans) avec le fils de l’empereur Manuel Comnène, Alexis II (11 ans) qui, trois ans plus tard, sera renversé et étranglé par un aventurier débauché, Andronic l’Ange (60 ans) qui épousera à son tour Agnès.

De ces « monstrances » il nous restera aussi les enluminures du « Codex de Pray », un manuscrit de plusieures pages (Bibliothèque de Budapast, Hongrie) très exactement daté entre 1192 et 1195. L’examen de ces enluminures montre par douze détails précis que l’enlumineur ne pouvait connaître tous ces détails qu’après avoir minutieusement observé et pris des croquis du Linceul. Soulignons aussi que les traces de brûlure en forme de L (dues à de l’encens) sont reproduites aux bons emplacements et sont antérieures à celles laissées par l’incendie de 1532, car une copie du Linceul (le Linceul de Lier, Belgnique) exécutée en 1516, porte ces mêmes traces aux mêmes endroits.

L’année 1204 a été une année funeste pour l’empire byzantin. Il a été partagé entre Baudoin IV (élu à la tête de Constantinople) et Othon de la Roche (devenu duc de la souveraineté de Thèbes et d’Athènes). C’est ainsi que commença la période des empereurs francs de l’empire byzantin qui s’écroula en 1261 par la prise de pouvoir du grec Michael III.

Le Linceul avait-il été secrètement vendu ou mis en sûreté au cours de cette période 1204-1261 ? Toujours est-il qu’il disparaissait en 1204. On a des sérieuses raisons de penser qu’il avait été en possession des Templiers pendant un certain temps, peut-être pour sa mise en sécurité et son transport, avant d’être remis à Othon de la Roche (duc de Thèbes et Athènes) qui l’aurait fait mettre ensuite en lieu sûr, en France, dans le château de son père. Othon de la Roche finira ses jours dans le château de sa femme à Ray (Haute-Saône) après avoir récupéré le Linceul. Celui-ci se transmettra dans l’héritage familial et c’est ainsi que Jeanne de Vergy entrera en sa possession.

En 1357, le Linceul réapparaît, placé par Jeanne de Vergy, dans une petite collégiale en Champagne construite l’année précédente par Geoffroy de Charny, son époux. Devenue veuve, Jeanne de Vergy se retira dans son château de Montfort-en-Auxois, emmenant avec elle le Linceul. Sa petite-fille, Marguerite de Charny, le cédera en 1453 au duc de Savoie, et de ce fait le Linceul sera transféré à Chambéry.

Le Linceul connut alors une grande dévotion, et de nombreux pélerins venaient de l’Europe entière. Le 26 avril 1506, le pape Jules II instituait la fête liturgique du Linceul au 4 mai (lendemain de la fête de l’Invention de la Sainte-Croix), et approuvait l’édition d’un « office du Saint Suaire » qui connaîtra jusqu’à sept éditions de 1507 à 1571.

La Sainte-Chapelle de Chambéry dans laquelle le Linceul était conservé sera détruite en 1532 par un terrible incendie. La relique sera sauvée de justesse et portera à jamais les stigmates de cet incendie.

Le dernier déplacement du Linceul s’effectuera en 1578. Il sera transféré « provisoirement » à Turin, capitale du duché de Savoie, pour éviter à son évêque, saint Charles Borromée de faire le déplacement à pied, l’hiver, à travers la montagne pour aller se recueillir devant le linceul afin d’obtenir la fin de l’épidémie de peste qui ravageait la ville. Il restera à Turin jusqu’à nos jours.

Actuellement c’est le Saint Siège qui est devenu propriétaire du Linceul, en 1983, par donation du duc de Savoie, Umberto II, dernier roi d’Italie.

Deux tentatives de destruction de la relique par incendie seront à déplorer :

– la première, en 1990, se soldera heureusement par un échec : deux individus, profitant des travaux dans la chappelle Guarani qui contenait le Linceul, ont arrosé d’essence le reliquaire qu’ils ont enflammé ensuite. Heureusement, le Linceul se trouvait enroulé dans un coffre de bois recouvert d’une feuille d’argent ciselée. Celle-ci a partiellement fondu, mais la toile de la relique n’avait pas souffert. C’est à la suite de cette tentative de destruction que l’on décida de placer la relique à l’abri de vitres blindées.

– en 1997 un terrible incendie détruira la chappelle Guarani, mais le Linceul sera miraculeusement sauvé de justesse par un pompier volontaire, Marion Trematore.

Le soir de l’incendie Mario Trematore n’était pas de service, mais décida d’aller prêter main forte à ses collègues. Arrivé sur place il vit que tous ses collègues évacuaient devant les risques d’effondrement en abondonnant le Linceul à son sort. Celui-ci était remisé dans un reliquaire fixé au sol, conçu pour résister aux attentats, composé de vitres anti-effraction résistantes aux balles.

Il entendit alors une voix qui résonnait dans son for intérieur qui lui donna cet ordre : « Tu dois sauver le Linceul ! », ce qui était suicidaire en ces circonstances. Pourtant il ne croyait pas que la relique était vraie, puisque les analyses par le C14 l’avaient démontré, mais elle faisait partie du patrimoine de la ville. La voix lui dit encore : « Il te faut une masse. » Il prit une masse puis frappa de toute son énergie sans s’arrêter pendant 20 mn. Il était épuisé, et le verre ne cédait toujours pas. Il n’en pouvait plus. Alors, la même voix lui dit : « Tape de côté »… et le verre céda aussitôt. Il prit dans ses bras le coffret en chêne massif recouvert d’argent ciselé contenant le Linceul, et à sa surprise le trouva léger, il se précipita vers l’extérieur tandis que la voûte commençait à s’effondrer. Il se sentait lui aussi léger : « je marchais sans toucher terre ». Sa peur avait disparu et il était « transporté de joie, d’une joie qui n’est pas de ce monde »… Quand il apparut dehors, les cinq milles Turinois qui l’attendaient massés sur la place de la cathédrale, anxieux du sort du Linceul, l’ovationnèrent, mais, épuisé, il s’effondra sans connaissance sur les marches du parvis. Il fut hospitalisé plus d’une semaine. Depuis sa vie est transformée. Lorsqu’il témoigna avec simplicité au Symposium sur le Linceul à Dallas (USA) en 2001, il souffrait encore des épaules.

En 2002, on a appris par les services secrets italiens que le Linceul était sur la liste des cibles potentielles d’Al Qaïda.

Les découvertes scientifiques

La première découverte qui lança tout le processus de recherche, mais aussi les premières polémiques hostiles, remonte à 1898 après la première photographie prise par le turinois Secondo Pia. Elle révélera au monde entier que les mystérieuses images présentes sur la toile du Linceul sont, en fait, des sortes de négatifs photographiques. Depuis, des propriétés de tridimensionnalité ont été mises en évidence. Une cabale accusera Seconde Pia, jusqu’à sa mort, d’être un faussaire et d’avoir trafiqué les plaques photographiques. Il faudra attendre la deuxième photographie prise en 1931 par le photographe Enrie, pour avoir confirmation qu’il n’y avait pas eu de trucage en 1898.

La relique présente les images, ventrale et dorsale se rejoignant par la tête, d’un homme nu, torturé, qui avait été flagellé, puis crucifié avec des clous aux mains et aux pieds, ayant porté une couronne d’épines et reçu un coup de lance romaine porté jusqu’au coeur dans le flanc droit. Cet homme porte une barbe bipointe et des cheveux longs rassemblés en natte. Il était en état de rigidité cadavérique lorsque « l’impreinte » négative s’était formée.

La toile

1. Dimensions

1,10 m de large par 4,30 m de long. La toile se trouve dans un état de conservation exceptionnel.

2. Le tissage

Le tissage a été réalisé sur un métier à tisser primitif, c’est-à-dire manoeuvré par les mains et les pieds. Très fin, il est typique pour la région du sud du Liban (Tyr, Sidon) des premiers siècles, il était réservé, en général, pour la soie. Cette toile à été blanchie après tissage.

3. Les microparticules

+ Les pollens

Des pollens ont été retrouvés et identifiés. Ils confirment avec certitude la présence de la toile au Moyen-Orient ainsi que son trajet vers l’Europe par Constantinople. Les travaux de Uri Baruch et Avinoam Danin confirment l’origine palestinienne du Linceul.

+ La terre de Jérusalem

L’analyse (réalisée par STURP (Projet de Recherche sur le Linceul de Turin) (USA) démontra que la terre était composée d’une variété de carbonate de calcium particulière à Jérusalem.

+ Présence de coton

Il s’agit du coton incorporé dans le tissage. L’espèce du coton utilisé est caractéristique du Moyen-Orient (Mésopotamie-Égypte). C’était l’espèce utilisée il y a vingt siècles.

+ Présence de laine

Comme apport extérieur : une fibre de laine identique à celle de Tunique d’Argenteuil ce qui semble indiquer que les deux linges avaient été au contact du même corps ou se sont trouvés en contact entre eux.

Le sang

1. Les premières polémiques

Le sang se trouve fortement présent sur les deux images. Au début du XX e siècle les traces ensanglantées ont été expertisées sur photographies par Paul Vignon (catholique) et Yves Delage (agnostique) : les coulées d’apparence sanguine se comportaient exactement comme du sang dans leur coagulation sur un tissu qui ne le buvait pas ou peu. La communication de leurs observations à l’Académie des Sciences sera réalisée par Yves Delage, professeur d’anatomie comparative à la Sorbonne, agnostique notoire, « allergique » aux phénomènes surnaturels et miraculeux. Affirmer devant la docte assemblée que ces taches se comportaient exactement comme de véritables taches de sang avec l’exactitude anatomique nécessaire, ce qui excluait une peinture, revenait à affirmer que le Linceul était authentique et que le crucifié était bien Jésus. Cette communication provoqua une contestation extrêmement violente de la part de cette docte assemblée. Elle était menée par le virulent chimiste Marcelli Berthelot, secrétaire de l’Académie, qui ira jusqu’à faire radier du compte-rendu de séance cette communication « pour ne pas déshonorer la Science »…

2. Les confirmations

C’est qu’en 1973 que l’on a eu la première confirmation scientifique de la présence du sang (et non pas d’un colorant) à partir d’analyses microchimiques. Des globules rouges ont même été photographiées au microscope électronique et présentées au public du premier Symposium organisé par le CIELT (Centre International d’Études sur le Linceul de Turin) en 1989 à Paris. Les recherches génétiques ont démontré en 1999, la présence effective de sang, d’origine humaine et de groupe sanguin AB provenant d’un individu de sexe masculin.

3. Le groupe sanguin

Le groupe sanguin AB se trouve être le même groupe que celui qui a été identifié sur le suaire d’Oviedo et sur la Tunique d’Argenteuil. Ce groupe AB est très rare. Au Moyen Orient, ce sont les groupes A et O qui dominent.

4. Les derniers contestataires

Malgré l’accumulation des preuves irréfutables de la présence bien réelle de sang humain sur la toile, il en est qui diffusent encore une désinformation régulière, menée en particulier par un chimiste américain, Walter Mac Crone. Il affirme avoir trouvé les traces de peinture, dont le vermillon, sur la toile, ce qui lui permet d’affirmer haut et fort que les traces sanguines ne sont en fait que de la peinture rouge. La présence de ces traces de vermillon n’altère en rien l’authenticité du sang. De nombreuses copies du Linceul ont été réalisées au Moyen Âge. À l’époque il y avait une pratique courante : faire toucher son œuvre à la véritable relique, d’où viennent des traces de vérmillon.

Les plaies

1. La flagellation

De nombreuses traces ensanglantées en forme de double haltère confirment que le supplicié a subi une violente flagellation romaine. Les conséquences de cette flagellation : une crise cardiaque couplée à une crise d’insuffisance respiratoire d’origine traumatique ont entraîné un décès rapide.

2. La couronne d’épines

Des coulées sanguines provoquées par des pointes acérées posées en rangées autour de la tête évoquent le port d’une couronne d’épines.

3. Les coups sur le visage

Le visage porte des traces de coups : la pommette droite est tuméfiée et le nez qui semble avoir été fracturé (oedème) se trouve dévié vers la droite, ce qui a aussi été constaté sur le Suaire d’Oviedo et confirmé par les Évangiles.

4. La couleur des cheveux

Puisque les images se comportent comme un négatif photographique la confirmation que l’Homme du Linceul était de race blanche est assez évidente. Jésus , lors de Sa mise au tombeau avait les cheveux et la barbe blancs ou gris clair qui sont devenus tels en quelques heures à cause des souffrances subies. Nous voyons dans ce blanchiment la traduction physique de l’épreuve de Gethsémani qui s’est accompagnée d’une sueur de sang (Lc 22, 44).

5. Le port de la croix

Le port du patibulum (pièce horizontale de la croix) a bien marqué et écrasé les traces ensanglantées laissées par la flagellation au niveau de l’arrière des épaules. Ces traces se superposent sur les mêmes régions anatomiques de la Tunique d’Argenteuil.

6. Les plaies des mains et des pieds

Les mains, au niveau des poignets, et les pieds, en leur milieu, ont été percés par des clous provoquant des coulées de sang nettement visibles.

Les textes évangéliques parlent des « mains » et non pas des poignets. Mais c’est parce qu’en hébreu, le mot main « Yad » inclut la partie anatomique du poignet.

L’immobilisation forcée du corps envahi de crampes et la déshydratation provoquée par la flagellation et la sueur de sang va déclencher au crucifié une tétanie générale des muscles moteurs telle que le corps va atteindre une température de l’ordre de 41°, ce qui va aggraver dramatiquement la déshydratation et la détresse respiratoire et provoquer une soif extrêmement intense soulignée par les textes évangéliques (Jn 19, 28).

7. La plaie du coeur

La forme et les dimensions de la plaie confirment que le coup a été effectué avec une lance romaine sur un homme déjà mort car la plaie ne s’est pas refermée.

Le fait qu’il s’est écoulé par cette plaie du liquide incolore qui ne s’est pas mélangé avec le sang confirme que le coup avait été porté jusqu’au coeur : l’anatomie précise que le sang provenait du ventricule droit et le liquide incolore provenait du péricarde, membrane qui entoure le coeur. Ces deux liquides ne sont pas miscibles entre eux.

Toutes ces observations se trouvent en totale conformité avec saint Jean (19, 34).

8. La rigidité cadavérique

Les images du Linceul montrent que le corps de Jésus était en état de rigidité cadavérique (rigor mortis) lorsqu’elles se sont formées. Cette rigidité s’est installée alors que le corps était encore sur la croix. La rigidité cadavérique s’installe vers la troisième heure après la mort dans des conditions normales. Dans le cas de Jésus, vu les souffrances de la flagellation et de la crucufixion, la rigidité cadavérique arrive dans les minutes qui ont suivi la mort. Cette rigidité disparaît deux à trois jours plus tard. Cette rigidité cadavérique confirme que l’image s’était formée moins de 48 heures après la mort, ce qui est conforme au délai évangélique.

L’image de face de Jésus observée sur le Linceul montre que les bras ont été ramenés sur le ventre. Malgré la rigidité du corps cela s’est avéré possible par rotation des bras.

Les données cadavériques lues sur le Linceul se trouvent donc en conformité médicale avec les textes de la Passion.

9. La tête inclinée

La tête se trouve inclinée vers l’avant. « Et inclinant la tête, il remis l’esprit » (Jn 19, 30). Cela se confirme par la distance bouche-articulation sternoclavière réduite sur le Linceul.

Les images « négatives photographiques ».

Nous abordons ici le sujet à la fois le plus extraordinaire et le plus énigmatique du Linceul de Turin, mais aussi le plus soumis à controverse car aucune explication naturelle répondant à toutes les propriétés des images n’a pu être trouvée à ce jour.

Les images se comportent comme un négatif photographique sans être totalement un véritable négatif, aussi lui préfère-t-on parfois le mot « d’impreintes négatives ».

Seul un examen de la relique avec un recul de plusieurs mètres permet de voir les images avec une certaine netteté. Les examens scientifiques ont démontré que l’intensité colorimétrique des fils qui forment l’image est la même sur toute la toile (isotropie). Cela exclut une application manuelle d’un colorant (car il y aurait des directions de pose des couleurs avec des variations d’intensité), d’un réactif chimique ou d’un colorant par décalque sur une statue. L’image ne s’était pas formée grâce à un phénomène de carbonisation superficielle. Dans l’ensemble les images ne traversent pas ou peu la toile et le sang fait obstacle, c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’images dessous les taches de sang.

Ces images nous apprennent ainsi que l’Homme du Linceul mesurait environ 1,78m et portait une natte de cheveux.

Les spécialistes s’accordent à penser que l’Homme du Linceul est de race juive par la forme de son visage, le port de la barbe, les cheveux longs et la présence d’une natte dans le dos (qui voulait dire que Jésus était non seulement d’origine juive mais aussi « nazir », c’est-à-dire consacré, « saint de Dieu ».

Tout ceci, encore une fois, se trouve en conformité avec les Évangiles.

Actuellement, aucune technique connue n’est capable de refaire une double image comme celles du Linceul de Turin avec toutes ses propriétés.

L’analyse par Carbone 14

Une analyse par le radiocarbone avait été effectuée en 1988 par trois laboratoires, l’opération étant coordonnée par le British Museum. La datation obtenue situait la fabrication de la relique dans la fourchette d’années 1260-1360 avec 95 pourcent de certitude, juste avant la date de réapparition historique moderne du Linceul… Il est certain que l’incendie de 1532, au cours duquel le Linceul avait commencé à se consumer dans son reliquaire, avait joué sur le taux de radiocarbone en l’enrichissant, donc en le rajeunissant. Cependant il faut reconnaître aussi que bien des anomalies, tant d’ordre éthique que technique, ont entouré ces analyses de sorte que les spécialistes du Linceul pouvaient se permettre légitimement d’avoir les plus grands doutes sur la maîtrise technique et l’impartialité de cette datation qui a été par ailleurs fort médiatisée. (À ce sujet, lire La Passion de Jésus de J.-M. Clercq, pp 110-127, et pour une information plus exaustive : Le radiocarbone face au Linceul de Turin de M.Cl. Oosterwyck-Gastuche).

Les opposants à l’authenticité du Linceul de Turin s’appuient sur cette datation situant une fabrication au Moyen Âge et aussi sur la déclaration de l’évêque de Troyes, Pierre d’Arcis, qui semble la confirmer. Cependant une telle affirmation entre en contradiction flagrante avec les données historiques évoquées (numismatique byzantine, le siège d’Edesse, l’homélie de Grégoire le référendaire, le Codex de Pray, etc.) qui prouvent une présence antérieure du Linceul.

LES MYSTÈRES DU LINCEUL

Nous abordons maintenant la partie la plus intrigante des particularités scientifiques du Linceul puisqu’elle nous fait pénétrer dans le mystère de la Résurrection de Jésus.

Absence de traces de putréfaction

Bien que recherchées, car le linceul a contenu un cadavre, il n’en a pas été trouvé de trace. Les caillots de sang, non rétractés, non ramollis, et non décollés, indiquent que le corps avait disparu après un séjour d’environ 36 heures dans le linceul, car il n’a pas été retrouvé de traces de putréfaction ni de décomposition de caillots qui se produisent normallement après un délai de 48 heures. Ceci est conforme aux textes évangéliques.

Disparition mystérieuse du corps

Cette disparition « mystérieuse » se constate par l’absence de trace d’arrachement de la toile qui était collée sur les caillots de sang. Ceci implique que le corps avait disparu de la toile en se retirant d’une manière mystérieuse, laissant sur la toile tout le sang échappé des plaies et de ses blessures sans arracher aucun filament de fibrine des croûtes de sang ni étiré la moindre fibre de la toile.

Mécanisme inconnu et à ce jour non reproductible de l’image négatif-photographique

Il a été découvert que les images correspondaient aux parties plus foncées des fils de la toile provoquées par un « racornissement » partiel des fibres superficielles composant le fil sur la portion précise nécessaire pour composer l’image. C’est la concentration des ces fibres altérées qui donne la profondeur de l’mage et son relief. Ce « racornissement » est dû à un phénomène d’oxydoréduction de la cellulose du lin. Donc cette image ne peut avoir été peinte : il y a une impossibilité matérielle et technique certaine.

Ce processus inconnu qui a formé l’image n’a cependant pas pu traverser les taches de sang qui ont fait obstacles : il n’y a aucune image sous les caillots.

Les deux images de l’homme du Linceul possèdent des propriétés en 3D

C’est-à-dire de tridimensionnalité. Voici la reconstitution du relief du visage du Christ obtenue grâce aux filtres adaptés (travaux Tamburelli).

La carte sanguine et les deux images du corps sont de natures différentes et ne se sont pas formées en même temps

La sang a maculé le linceul selon les lois de la pesanteur et en respectant l’anatomie : on voit le filet sanguin s’écouler sur le côté du coude droit jusqu’au contact de la dalle funéraire où elle va occasionner un petit pâté.

Mais il est surprenant que sur le visage les taches de sang qui ont étaient provoquées par la couronne d’épines au niveau des tempes se projettent pour partie sur l’image des cheveux. Force est de constater qu’il existe une non superposition anatomique des taches de sang avec les deux images du corps.

Il n’y a pas d’images du côté du corps (absence d’images latérales)

Et pourtant le linceul bordait tout le corps !

Il n’y a aucune déformation des images, elles se sont formées comme si la toile s’était mise à plat lors de leur formation, à la disparition du corps

Les images du corps se sont projetées d’une manière orthogonale (perpendiculaire) sur la toile pour ne pas être déformées.

Nous sommes donc bien dans l’obligation de constater :

1. Que la carte sanguine ne retrouve sa compréhension de lecture que replacée en volume sur le corps,

2. Les deux images chromatiquement inversées ne sont lisibles que lorsque l’on examine la toile à plat, alors qu’elle enveloppait le corps ; s’il en avait été autreemnt, les images auraient été tellement déformées qu’elles auraient été incompréhensibles.

Ces deux cartes, qui ne coïncident pas exactement ont été réalisées à deux moments différents.

La carte sanguine s’était réalisée par contact du corps avec la toile, dès la mise en linceul, le corps étant couché. Ceci s’accepte sans difficulté.

Le négatif s’est fait dans un deuxième temps, au moment de la disparition du corps et sans laisser de trace de cette disparition (aucun arrachement des fibres de la toile collant aux caillots par exemple) comme si le corps avait irradié une lumière inconnue sur la toile du Linceul (devenue photosensible à ce rayonnement) qui se serait tendue à la manière d’un écran mais entourant encore et l’avant et l’arrière du corps de Jésus ? Ou encore comme si le corps avait traversé la toile pour disparaître en se divisant en deux (le côté ventral et le côté dorsal).

Les images du Linceul se seraient donc formées à l’instant ultime précédant la disparition du corps de son enveloppe de toile, c’est-à-dire pour le chrétien, à l’instant ultime précédant la Résurrection.

Cette affirmation va trouver tout son éclairage par le constat des éléments suivants :

Le corps était debout

L’Américain Lavoie a poussé l’expérimentation pour vérifier la position de la tête lorsque l’image s’était formée. Il s’est rendu compte que la forme générale des cheveux indiquait que la tête était en position debout. En position couchée, les cheveux se seraient inévitablement étalés et l’image aurait été différente d’autant plus que le corps étant en rigidité cadavérique montre que la tête était inclinée en avant (donc relevée en position couchée).

Cherchons la confirmation par d’autres voies.

Si le corps était couché, nous devrions constater aussi sur l’image dorsale du corps ces deux éléments incontournables :

1. L’aplatissement du dos au niveau des épaules par la simple pression du corps sur le plan où il repose.

2 . L’applatissement du massif fessier pour la même raison.

Or, nous constatons que les épaules et le massif fessier n’ont subi aucun aplatissement : ils conservent leurs volumes et leurs rondeurs comme on peut le constater sur un corps en position debout.

Le corps flottait en apesanteur

Les deux images semblent donc bien s’être formées lorsque le corps s’était mis en position debout. Mais cette déduction inévitable entraîne un autre problème : la position des pieds indique que le corps ne reposait pas sur ses pieds : il devait donc flotter ! Voilà qui devient encore plus incohérent de la part d’un cadavre.

Le corps était éclairé

Les deux images présentent un relief avec des ombres, ce qui laisse sous-entendre la présence d’un éclairage par une source extérieure. Là encore l’expérimentation va permettre de trouver une réponse : pour obtenir expérimentalement le même relief lumineux avec les ombres, le corps doit être éclairé par une source lumineuse provenant par-dessus la tête !

Conclusion : le corps de Jésus debout, en apesanteur, avec un éclairage au-dessus de la tête avant de disparaître

Voilà résumées les caractéristiques du corps tel qu’on peut le voir en négatif photo noir et blan sur la toile du Linceul. Les deux images de Jésus de Nazareth se seraient donc formées lorsque le cadavre en rigidité cadavérique se redresse pour se mettre debout, flottant dans l’espace, la toile se tendant comme pour faire deux écrans ; le corps avant de disparaître de manière mystérieuse reste encore entre les deux pans un court instant pour irradier un rayonnement inconnu qui va imprimer ses deux images sur la toile, à moins que ce ne soit le corps qui va passer à travers cette toile en y imprimant deux images.

Ces deux impreintes d’image sont analogues aux négatifs photographiques avec propriétés de tridimensionnalité ; ils montrent que le corps recevait une lumière par-dessus la tête, alors qu’il se trouve dans un tombeau d’où la lumière directe ne peut arriver avec l’impossibilité de se mettre dans l’alcôve funéraire par manque de hauteur de plafond. Une fois que le corps a laissé l’impreinte de son image, il disparaît mystérieusement et le linceul s’effondre sur lui-même ! Voilà les conclusions que l’on est en droit de tirer en observant les images du Linceul !

Évidemment, ces observations et les hypothèses qui en découlent sont d’une incongruité scientifique absolue, en totale contradiction avec la logique humaine qui n’est pas celle de Dieu. Le Linceul, à l’image du Christ devient lui aussi un signe de contradiction !

Pour le chrétien, la réponse est bien plus simple : ces images mènent aux portes du mystère de la Résurrection de Jésus-Christ. C’est une démarche de foi ; la Science ne pourra jamais prouver ou démontrer la Résurrection qui n’est pas de son domaine d’étude car ce n’est pas un phénomène reproductible donc étudiable selon les critères de la science expérimentale.

Quant aux rationalistes, aux fondamentalistes laïcs et aux christianophobes de tous poils, ils n’ont pas fini d’avoir des cheveux blancs et des insomnies dans leur acharnement à montrer que le Linceul de Turin est une fabrication humaine, ce qu’ils sont impuissants à prouver par expérimentation.

On mesure ainsi d’autant plus la tentation du monde laïc de dissocier de Jésus l’aspect historique (Jésus de Nazareth) de l’aspect messianique (Jésus-Christ) qui est pourtant la finalité de sa mission temporelle.

***

Sur le Linceul de Turin, nous retrouvons, en récapitulatif, toute la Passion avec Gethsémani, la flagellation, le couronnement d’épines, le port de la croix, la mort, le coup de lance, la rigidité cadavérique, la mise en linceul au tombeau et la RÉSURRECTION.

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Jean-Claude LARCHET Le point de vue orthodoxe sur la traduction du Notre Père

Disons-le d’emblée, il n’y a pas en France de texte unique du Notre-Père, que ce soit pour la pratique ecclésiale ou la pratique personnelle.
Cela s’explique en grande partie par la situation ecclésiologique de la diaspora, où il n’y a pas une Église locale unique avec une langue unique et une autorité épiscopale unique, mais la présence d’une pluralité d’Églises locales, correspondant à la multiplicité des groupes d’immigrés auxquelles elles correspondent et représentées chacune par un diocèse, plusieurs diocèses pouvant se superposer sur un même territoire, ce qui n’est pas conforme aux canons de l’Église ancienne toujours en vigueur dans l’Église orthodoxe, mais est une réalité pour le moment irréformable, tant il est difficile, concrètement, de réunir les conditions pour la création d’une Église locale unique.
Depuis de nombreuses années s’est constituée dans chaque pays de la diaspora une Assemblée des évêques orthodoxes ; ces Assemblées ont un président d’honneur qui, conformément aux diptyques (ordre de préséance selon le rang honorifique), est l’évêque-métropolite du patriarcat de Constantinople, mais cette Assemblée n’a pas, selon l’ecclésiologie orthodoxe, de réalité canonique (comme en a une l’Assemblée des évêques ou le Saint-Synode d’une même Église locale), et elle peut formuler des avis mais n’a pas de pouvoir décisionnaire et exécutif, chaque évêque restant, selon les statuts définis lors de la création de ces Assemblées, soumis au seul Synode de l’Église locale dont il dépend.
Du point de vue linguistique, il y a à la base deux langues liturgiques fondamentales : le grec liturgique, adopté par les Églises locales de tradition grecque (la partie hellénophone des patriarcats de Constantinople, d’Alexandrie et de Jérusalem, la Grèce, le Mont-Athos), et le slavon, adopté par les Églises de tradition slave (russe, bulgare, serbe). Certaines Églises utilisent depuis plus ou moins longtemps la langue vernaculaire qui leur est propre : c’est le cas de l’Église d’Antioche et d’une partie de l’Église de Jérusalem qui utilisent l’arabe, de l’Église roumaine et de l’Église serbe.
Présentes dans la diaspora, ces différentes Églises ont, pour la plupart de leurs paroisses, gardé ces langues, mais ont aussi créé des paroisses francophones, qui ont le français comme langue liturgique ; il y a aussi des paroisses mixtes qui utilisent alternativement les deux langues ; dans certaines paroisses, certaines prières importantes (comme le Credo ou le Notre Père) sont dites deux fois : une fois dans la langue originale et une fois en français.
Ce sont surtout les traductions en français de la Liturgie, laquelle inclut le Notre-Père, qui ont contribué à définir la traduction de la prière dominicale.
Or plusieurs traductions de la Liturgie en français ont été réalisées au fil du temps et utilisées par les paroisses francophones, et des différences notables y apparaissent dans la traduction du Notre Père. Il y a une entente sur la façon de traduire toute la première partie, mais trois des demandes de la seconde partie, qui sont problématiques, ont été diversement traduites. Cet article prenant place dans le cadre d’une réflexion sur la 6edemande en relation avec le changement de traduction récemment imposé à ses fidèles par l’Église catholique-romaine, nous nous concentrerons sur elle et nous limiterons, à la fin de cet article, à quelques remarques sur les autres demandes qui posent un réel problème aux yeux des Orthodoxes.
Voyons tout d’abord comment la 6e demande a été traduite au fil des différentes éditions de la Liturgie de saint Jean Chrysostome – qui a une valeur normative puisque le Notre Père y est chanté (selon l’usage des Églises russe et roumaine) ou lu (selon l’usage des Églises grecque et serbe) solennellement et publiquement.
— La Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, traduction de Mgr Sylvestre, Nice, 1965 est l’une des premières éditions orthodoxes du texte de la Liturgie en français et a été longtemps en usage dans la plupart des paroisses francophones ; elle l’est encore dans quelques-unes d’entre elles qui n’ont pas voulu modifier les habitudes des célébrants et des fidèles : « et ne nous induis pas en tentation. » Cette traduction était celle de la traduction Second de la Bible, une version protestante du XIXe siècle appréciée par beaucoup d’Orthodoxes (aujourd’hui encore) pour sa littéralité. Certaines paroisses francophones de tradition slave ont volontiers adopté cette traduction de la 6e demande parce qu’elle correspond formellement à la traduction slavonne : не введи нас во искушение.
— Le 4 janvier 1966, les autorités catholiques, orthodoxes et protestantes ont décidé d’adopter une traduction commune du Notre Père en langue française. Du côté orthodoxe, la déclaration commune qui a été faite à ce sujet porte les signatures des membres de ce qui était alors le Comité Interépiscopal Orthodoxe (ancêtre de l’actuelle Assemblée des Évêques Orthodoxes de France [A.E.O.F.]). La traduction adoptée pour la 6e demande était alors la suivante : « et ne nous soumets pas à la tentation. »
— La Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, publiée avec la bénédiction de S. E. Georges, archevêque de l’Archevêché des paroisses russes en Europe occidentale (rue Daru), éd. Liturgica, Paris, 1999, s’est conformée à cette traduction, qui a été également adoptée quelques années plus tard par une édition destinée aux paroisses francophones de l’Église roumaine : Divines Liturgies de saint Jean Chrysostome et de saint Basile le Grand, traduites du grec par l’archimandrite Jacob, le hiéromoine Élisée et le père Dr. Y. Goldman, éditées avec la bénédiction de S. E. l’archevêque Joseph, métropolite de la Métropole orthodoxe roumaine d’Europe occidentale et méridionale, Villebazy, 2002).
Si beaucoup de prêtres ont adopté la traduction de la Liturgie publiée par les éditions Litrurgica en remplacement de celle de Mgr Sylvestre, beaucoup se sont montrés réticents à adopter le texte du Notre Père, et beaucoup de fidèles ont eu la même attitude. D’une part ils ne voulaient pas, pour une prière courante, changer des habitudes acquises de longue date ; d’autre part ils percevaient bien que le texte est problématique du point de vue de la théologie et de la spiritualité orthodoxes.
La traduction précédente : « ne nous induis pas en tentation » était déjà ambiguë ; mais la nouvelle formule indiquait très clairement que non seulement Dieu est susceptible nous tenter, mais encore qu’il peut nous soumettre à la tentation, laissant entendre que non seulement il peut nous la proposer, mais encore nous en imposer le contenu. Or il est clair pour la conscience orthodoxe : 1) que Dieu lui-même ne nous tente pas (cf. Jc 1, 13) et que c’est là, selon les Écritures et l’enseignement unanime des Pères, l’œuvre du Tentateur, le diable, et des démons, et 2) qu’il est encore moins susceptible de nous soumettre à la tentation, car l’homme ne peut être poussé à succomber à la tentation que par le pouvoir que le diable exerce sur lui (dans le cas d’un non-baptisé par exemple), et/ou par sa propre volonté suivant ses passions (ou comme le dit l’Écriture [Jc 1, 14], par sa propre convoitise).
Beaucoup avaient conscience que, si l’on voulait garder le verbe « soumettre », la formule correcte aurait dû être : « fais que nous ne soyons pas soumis à la tentation », ou encore, comme le disait l’ancienne traduction catholique qui ne respectait pas la littéralité du texte mais correspondait bien à son sens véritable : « ne nous laisse pas succomber à la tentation ».
Une résistance passive à la nouvelle formule s’est donc établie de facto dans bien des cas ; quelques voix se sont élevées, la plus militante et retentissante étant celle de Jean-Marie Gourvil qui, d’abord dans un texte polycopié puis dans un livre publié en 2004 aux éditions F.-X. de Guibert et intitulé Ne nous laisse pas entrer dans l’épreuve. Une nouvelle traduction du Notre Père, a argumenté de façon approfondie contre cette nouvelle traduction, récapitulant toute la littérature patristique et exégétique afférente qui ne va pas dans son sens. À la fin de son étude, il proposait différentes traductions possibles : « ne nous laisse pas succomber à la tentation » ; « ne nous laisse pas entrer dans la tentation » ; « ne nous laisse pas être emportés par la tentation » ; « ne nous laisse pas entrer dans l’épreuve » ; « ne nous laisse pas succomber dans l’épreuve ». Au moment de publier le livre, la commission liturgique de l’A.E.O.F. avait cependant adopté la formule « ne nous laisse pas entrer dans l’épreuve », et J.-M. Gourvil, la tenant déjà pour acquise par l’A.E.O.F l’utilisait comme titre de son livre, non sans créer une certaine incohérence avec son contenu.
— C’est cette dernière traduction – « ne nous laisse pas succomber dans l’épreuve » – qui fut en effet adoptée dans une nouvelle édition du texte de la Liturgie : La Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, traduction de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France, éd. de la Fraternité Orthodoxe en Europe Occidentale, Paris, 2007. Contrairement à ce qui est indiqué, l’Assemblée des évêques n’a pas réalisé cette nouvelle traduction mais l’a simplement approuvée, sans avoir le pouvoir de l’imposer à l’ensemble des paroisses orthodoxes, certains évêques de l’A.E.O.F. (comme le métropolite Emmanuel ou le métropolite Joseph) approuvant parallèlement des traductions différentes.
Cette traduction n’a pratiquement pas été adoptée, car outre qu’elle impliquerait, une fois de plus, que l’on modifiât des habitudes acquises communautairement et individuellement, elle pose presque autant de problèmes que la précédente, car s’il est exclu que Dieu puisse soumettre l’homme à la tentation ou seulement la lui proposer, il n’est pas exclu en revanche qu’il mette sur la voie de l’homme certaines épreuves considérant qu’elles seront pour lui un moyen de progresser spirituellement en les affrontant puis en les surmontant : cela ressort de différents passages des Écritures (voir par ex. 1 P 1, 6, 7), mais aussi de l’enseignement commun des Pères.
Certains fidèles ont ouvertement critiqué cette traduction (en particulier sur le « Forum orthodoxe francophone », très actif à cette époque). D’autres ont glosé pour rendre la formule plus acceptable, proposant par exemple : « ne nous soumets pas à l’épreuve au-delà de ce que nous pouvons supporter », ou encore, comme Jean-François Colosimo dans l’une de ses chroniques du Monde des religions : « ne nous laisse pas persévérer dans l’épreuve », ce qu’il aurait fallu plutôt formuler : « ne nous laisse pas endurer des épreuves trop longues ou trop dures » ; mais toutes ces propositions s’éloignent considérablement du texte. Le mot peirasmos a d’ailleurs dans le Nouveau Testament et chez les Pères presque toujours le  sens de tentation, le mot épreuve correspondant plutôt au grec dokimé.
Il convient sans aucun doute de revenir à la notion de tentation, n’en déplaise à ceux dont la mentalité sécularisée (encore peu présente dans l’Église orthodoxe) n’aime entendre parler ni de diable, ni de péché, ni donc de tentation).
— Dans Les Divines Liturgies de saint Jean Chrysostome et de saint Basile le Grand, et la Liturgie des Dons Présanctifiés, selon l’usage du Mont-Athos, traduction publiée avec la bénédiction de S. E. le métropolite Emmanuel, Métropole grecque de France, Patriarcat œcuménique, Saint-Laurent-en-Royans et Solan, 2009, le Père Placide Deseille (qui a par ses travaux antérieurs acquis une grande autorité en matière de traduction de textes scripturaires et patristiques) propose tout bonnement d’en revenir à l’ancienne traduction catholique : « ne ne nous laisse pas succomber à la tentation » qui, comme nous l’avons déjà noté, ne correspond pas à la littéralité du texte, mais bien à son sens. La traduction liturgique du Père Placide Deseille, dans sa globalité, n’a cependant été adoptée que par quelques paroisses grecques, car elle diffère en certains points de l’usage des Églises slaves.

— En 2013, l’Église catholique, devant l’opposition suscitée en son sein par la formule « ne nous soumets pas à la tentation » qu’elle avait conservée jusqu’alors, a décidé d’adopter cette nouvelle traduction : « et ne nous laisse pas entrer en tentation. »
Cette traduction est sans aucun doute correcte. Outre qu’elle est justifiable d’un point de vue grammatical si l’on se réfère à l’hébreu et à l’araméen (voir à ce sujet les arguments de Joachim Jérémias, de Jean Carmignac, et du chanoine Rose), elle est littéralement confirmée par une parole du Christ au jardin des Oliviers : « Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation : l’esprit est ardent, mais la chair est faible » (Mt 26, 41 = Mc 14, 38 ; cf. Lc 22, 40.46).
On peut cependant discuter, d’un point de vue stylistique, de l’usage de la préposition « en ». La traduction : « Et ne nous laisse pas entrer dans la tentation » aurait été parfaite. C’est la traduction qu’avait sans succès proposée Oliver Clément pour l’Église orthodoxe, et c’est celle que pour ma part j’ai adoptée depuis longtemps après un examen soigneux de la question, et qui est utilisée aussi dans ma paroisse. Elle reste proche du texte tout en correspondant bien à la nature et au processus de la tentation tels que les conçoit la tradition patristique : un processus qui comporte différentes étapes, que l’on peut stopper avec l’aide de Dieu à son seuil (que les Pères appellent « suggestion » ou « attaque » [prosbolè]), ou dans son « antichambre » (qu’ils appellent liaison [sunduasmos]), mais dont on devient prisonnier et qui nous mène irrémédiablement au péché dès que l’on est entré dans le stade suivant (j’ai donné de ce processus une description détaillée dans mon livre Thérapeutique des maladies spirituelles, 5e éd., Paris, 2013, p. 521-524).
Les évêques orthodoxes de France n’ont pas pris position par rapport à cette traduction dans la mesure où pour le moment elle ne concerne que l’Église catholique, mais l’A.E.O.F. devrait sans problème pouvoir l’adopter, soit unilatéralement, soit dans le cadre d’un accord avec les autres confessions chrétiennes, comme cela avait été le cas en 1966.
Si cette formule devenait commune à tous les chrétiens, il faudrait encore, pour que l’ensemble du Notre-Père le soit aussi, résoudre, aux yeux des Orthodoxes les problèmes posés par deux autres demandes de sa seconde partie :
— la 4e demande a été généralement traduite par « donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien », ou « donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour », mais cela ne correspond pas à l’adjectif grec epiousios ; la traduction approuvée par l’assemblée des l’A.E.O.F. en 2007 propose « essentiel », et d’autres traductions orthodoxes proposent « substantiel » ou « suressentiel », adjectifs qui correspondent mieux à l’intention de texte qui ne vise pas le pain matériel, mais le pain surnaturel : soit l’eucharistie, comme le pensent de nombreux Pères dans leur commentaire de la prière dominicale, soit plus généralement la grâce divine qui alimente notre vie spirituelle ;
— la dernière demande est traduite depuis longtemps dans l’Église catholique-romaine et les communautés protestantes par « délivre-nous du mal », traduction que le Comité Interépiscopal Orthodoxe (ancêtre de l’A.E.O.F.) a formellement adoptée en 1966 lorsqu’il a accepté la traduction œcuménique. Mais la grande majorité des paroisses et des fidèles orthodoxes sont attachés à une traduction plus respectueuse du texte grec ῥῦσαι ἡμᾶς ἀπὸ τοῦ πονηροῦ : « délivre-nous du Malin ».
On peut d’ailleurs considérer que cette 7e demande est connectée avec la 6e par son sens et par le « mais » qui la précède et qui introduit une opposition, ce qui confirme le bien-fondé de la traduction : « ne nous laisse pas entrer dans la tentation », « le Malin » étant celui qui propose la tentation et nous pousse à y entrer.
Article publié dans la revue Ressources, n°1, Avril 2015, p.  20-24

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Icône de la Trinité d’André Roublev

Chers amis ,

j’ai une immense joie de vous présenter mon modeste résumé d’un livre bouleversant de Nicolaï GRESCHNY « L’Icône de la Trinité d’André Roublev ».

Ce livre nous fait part d’une interprétation de l’icône de la Trinité d’André Roublev , par Greschny, iconographe d’origine russe.

Ce livre veut montrer (et cela est attesté par des photos) que c’est la Sainte Face du linceul de Turin qui se reflète à la surface de la coupe et vers laquelle s’incline l’ange de droite, le Fils, pour contempler le mystère de Sa Passion.

« L’Icône de la Trinité d’André Roublev » de Nicolaï GRESCHNY

Préface de Mgr Coffy
Editions du Lion de Juda
ISBN 2-905480-09-2
Imp. Coop. Du Sud-Ouest-Albi
Copyright 1986

« Vaincre la déchirante division de ce monde par la contemplation de la Très Sainte Trinité ».
Serge de Radonège

« L’explication que j’ai reçue de ma famille m’aide à entendre ce dialogue muet des Trois, un dialogue qui porte sur le salut de l’humanité par la passion du Fils, afin que l’humanité communie un jour à l’Amour Infini des Trois. »

PREFACE

Les propos de Nicolas Greschny sur l’icône de Roublev, que le P. Gilbert Assémat a recueillis et qu’il nous présente, ne sont pas des considérations sur l’art, mais une méditation sur la Trinité. Ces pages nous livrent, avec une grande sûreté doctrinale, certains aspects du mystère de Dieu : sa vie intime, son projet de salut sur le monde. Tout l’essentiel est dit de ce qui constitue le cœur de notre foi : la Trinité, l’Incarnation, la Rédemption, l’entrée dans la Gloire.

En répondant aux questions que le P. Assémat lui pose, Nicolas Greschny ne se situe pas d’abord en artiste qui commente et explique le chef-d’œuvre d’un maître. Il ne se place pas devant le tableau, lui demeurant extérieur et se livrant à une analyse formelle. Il est dedans, pourrait-on dire. Il est le croyant qui a longuement contemplé l’Icône de la Trinité. Il est le croyant qui, situé à l’intérieur du mouvement d’amour qui va du Père au Fils par l’Esprit-cette périchorèse-, reçoit révélation du Mystère de Dieu que Roublev lui-même a accueilli et prié et qu’il a rendu présent, en quelque sorte, dans l’image. Tout, dans cette contemplation, devient pour lui révélation, comme l’Ecriture Sainte que l’image ne fait que transcrire. Les visages, les attitudes et les gestes des personnages, les couleurs et les lignes, le rocher, l’arbre et la maison sont Parole de Dieu. Chaque détail renvoie d’ailleurs à la Genèse, à Daniel, à l’Evangile, à St Paul. Nicolas Greschny n’explique pas l’Icône, il la laisse parler. Ici l’œil écoute et le cœur accueille la Grande Nouvelle : « Dieu se fait homme afin que l’homme reçoive pouvoir de devenir fils de Dieu ».

Cette Parole que Dieu lui adresse lui parvient à travers l’image, mais il en saisit toutes les richesses en s’insérant dans une longue lignée de témoins. Pour les comprendre, il se replonge dans la tradition : « Voilà, dit-il en substance, le sens de cette icône que se transmettent mes parents de générations en générations ; voilà la connaissance du mystère de Dieu et du mystère de l’homme telle que je la reçois de la tradition ecclésiale ». Il écoute la Parole de Dieu en Eglise.

Ce que Nicolas Greschny nous dit de cette icône est important. Tout aussi important pour nous est peut-être ce qu’il ne dit pas, mais que nous découvrons en écoutant le dialogue qu’il poursuit avec le P. Assémat : je veux dire la manière d’écouter et de vénérer une icône.

Nous n’avons pas un discours sur la Trinité, l’Incarnation, la Rédemption, à propos d’un tableau de Roublev. C’est l’image elle-même qui progressivement dévoile le mystère. Elle présente le mystère au double sens de ce verbe : elle le révèle, le fait connaître et d’une certaine manière, le rend présent au cœur du croyant.

A condition de donner à ce mot son sens large, qui d’ailleurs est traditionnel, l’Icône est « Sacrement ». Elle représente et présente le mystère de Dieu.

Elle le représente, non en ce sens qu’elle serait comme la photographie. Dieu en effet ne peut se représenter Lui qui est au-delà de tout. Mais en ce sens qu’elle est la voie qui nous conduit à la rencontre. Un peu comme les paroles échangées entre personnes qui s’aiment, expriment et réalisent une présence mutuelle. Dans l’Icône, la représentation est présence et non reproduction. En d’autres termes, l’Icône ne mesure pas le divin, car elle deviendrait alors idole. Elle appelle l’homme à transgresser le visible pour rejoindre l’invisible. Les disciples en entrant en relation avec Jésus de Nazareth ont rencontré le Fils de Dieu. Les chrétiens en prenant le pain et le vin consacrés communient à leur Seigneur.

Une icône ne se regarde pas comme un tableau de Matisse ou de Braque. Elle se vénère. Elle est parole de Dieu qui sollicite une réponse. Elle est appel à la contemplation du mystère de Dieu. Le peintre d’icônes prie avant de peindre. Il était même, en Orient, consacré pour cette œuvre. Et nous connaissons l’une des prières de consécrations : « Eclaire, O Dieu et Seigneur de toutes choses, ton serviteur N…, comble son âme, son cœur et son esprit, de sagesse. Dirige ses mains afin que, dans la pureté et la clarté, elles peignent les traits de ta Personne, ceux de ta Mère Immaculée et de tous les Saints, pour la gloire, le rayonnement et la glorification de toute l’Eglise ».

Conçue et élaborée dans la prière, l’’icône est pour la prière. Elle est un don de Dieu qui s’accueille dans l’action de grâces, le « sacrement » de la Présence qui appelle notre présence.

Les icônes – ou des reproductions photographiques – généralement excellentes – remplacent nos statuettes et nos images pieuses d’antan. Même nos églises qui ont été débarrassées de leurs statues de plâtre, accueillent dans le sanctuaire, une ou plusieurs icônes. L’art y gagne. La vie spirituelle aussi. A une condition cependant : que l’icône ne devienne pas un élément décoratif de nos appartements parce que c’est la mode, mais objet de vénération. Des chrétiens semblent pressentir le caractère sacré de l’icône qui ne la suspendent pas à un mur, mais la placent dans un espace réservé à la prière, avec tenture, tapis, lampes à huile et fleurs.

Ce livre du P. Assémat et de Nicolas Greschny, léger de poids mais lourd de contenu, nous aide à faire la conversion nécessaire pour entrer dans le mystère de l’icône. Que tous deux en soient remerciés.

Robert COFFY
Archevêque de Marseille

1ère partie : LE SUJET

Dans le sillage de « Serge de Radonèje »

Circonstances dans lesquelles l’icône de la Trinité a été peinte

A la charnière du XIVe et du XV siècle le célèbre monastère de la Sainte Trinité fondé par un très grand saint russe Serge de Radonèje (mort en 1392), semble être pour André Roublev un véritable point d’attache. L’icône de la Trinité a été peinte par Roublev sur la commande de l’higoumène (abbé) Nikon pour l’iconostase de l’Eglise. Elle était placée du côté droit de la « porte royale », c’est-à-dire la porte centrale de l’iconostase. Elle est très grande : 142 cm de haut sur 114 cm de large. Roublev a peint cette icône à un âge très avancé quand il était en pleine maîtrise de son art, au sommet de ses capacités.

Un thème très ancien…

L’icône de Roublev se base sur le récit très connu de la Genèse (18, 1-10) appelée la Philoxénie en Orient et l’Hospitalité d’Abraham en Occident. La richesse de ce texte inspira un grand nombre d’icônes. Mais dans toutes les icônes à ce sujet, variées qu’elles soient, on peut distinguer trois éléments de la scène : le décor, les personnages et la table elle-même avec son décor.
Le décor est une partie supérieure de l’icône. Il est composé de 3 éléments suivants : la tente d’Abraham, le chêne de Mambré et la colline. Mais souvent dans les icônes à ce sujet nous trouvons de divers amalgames de ces 3 éléments. Par exemple : deux bâtiments, avec ou sans arbre, un seul bâtiment encadré de deux arbres etc. La scène dans la plupart des cas est très chargée car à part ces multiples variations on trouve aussi Abraham et Sara, le sacrifice que fait Abraham de son fils Isaac. En outre la table est bien garnie : de multiples mets sont posés sur cette table parée d’une nappe : galettes, gateaux etc., accompagnés de coupes, de vases etc.

L’innovation de Roublev

Roublev ne modifie pas le sujet, mais déplace l’accent. L’icône habituelle de l’hospitalité d’Abraham (toujours perpétuée d’ailleurs jusqu’à nos jours) exposait une fête somptueuse en l’honneur de la visite des trois personnages. Celle de Roublev est devenue une contemplation silencieuse de Dieu en trois personnes venu parmi nous. Finalement Roublev, restant très fidèle à l’Ancien Testament qui prédit à plusieurs reprises la venue du Messie, a simplement rappelée QUI est en réalité accueilli par Abraham ayant supprimé pour cela tous les éléments superflus et s’étant concentré que sur Dieu en trois hypostases,.. Le récit biblique, comme le dialogue, nous présente en effet tantôt un, tantôt trois personnages et le pluriel est étrangement mêlé au singulier. « Seigneur, dit Abraham, daigne t’arrêter…. Vous vous réconforterez… » Sait Augustin, je crois, précise déjà la signification de la scène : « tres vidit, unum adoravit », dit-il d’Abraham, « il vit trois (personnes), il adora un seul (Dieu).
Que sont devenus sur l’icône de Roublev les 3 éléments des icônes à ce sujet ? Dans celle-ci le décor est renvoyé en haut, dans un espace restreint, les trois éléments (maison arbre, colline) réduits à ne figurer que comme symboles. Abraham et Sara ont disparu. Rien sur la table sauf une coupe. Quant aux trois anges, ils occupent la quasi-totalité de l’icône.

2ème partie : LE COLLOQUE DIVIN

Regarder et contempler

Le P. Assémat : On a tout dit de cette icône : sa beauté souveraine, la finesse et la douceur des visages, leur similitude parfaite, la paix sereine qui émane du tableau, la communion frappante entre les personnes, leur « mouvement immobile », l’harmonie et la richesse somptueuse des couleurs, la luminosité qui semble jaillir des anges aux ailes d’or, le jeu des lignes droites et des lignes arrondies, la légèreté presque immatérielle de l’ensemble…
Comment vous-même nous invitez-vous à l’examiner ?

N. Greschny : Il faut se contenter de la regarder lentement, très lentement. En Occident et peut-être plus spécialement en France, vous voulez toujours analyser méthodiquement, rationnellement. Une icône, particulièrement celle-ci, exige qu’on la contemple. Il faut en quelque sorte se laisser imprégner de tout ce qu’elle reflète.
Les visages des trois anges expriment une certaine gravité sans aucun doute, mais aussi, et tout autant, une douceur étonnante, une paix qui rayonne. Or ceci est très particulier à Roublev et mérite une attention singulière. Je crois que pour obtenir ce résultat Roublev a utilisé une technique nouvelle qui venait d’être découverte. D’après l’italien Vassari, le peintre Hubert Van Eyck (le frère aîné de Jean, beaucoup plus connu) inventa un mélange, celui de l’œuf, de l’huile et de l’eau, et ce mélange œuf-huile-eau (à la place d’œuf-eau) fut particulièrement heureux car c’est grâce à lui que l’on put atteindre un modèle extrêmement doux…

De manière générale Roublev opte de peindre des êtres de paix et de tendresse. Et c’est cela qui est frappant vu le contexte historique de son époque : la Russie étant sous le joug des tartares subit de nombreux horreurs, tels que rançons, meurtres, violences de toute sorte.. Le monastère de la Trinité Saint Serge est incendié, la cathédrale de la Dormition à Vladimir, celle-là même que Roublev a couverte de fresques, est saccagée.
En saine logique il devrait faire appel à un Dieu vengeur, invoquer sur les ennemis les colères du ciel. Et voilà que, contrairement à ce que l’on pourrait attendre, sans doute parce que dans sa foi profonde il se plonge dans le Christ de l’évangile, il songe à un Dieu infiniment compatissant, plein d’amour pour un peuple dont les souffrances débordent, à un Dieu tout proche des hommes, plein de pitié et de tendresse, un Dieu d’une paix infinie et d’une douceur inouïe, qui pourra apaiser les populations, leur redonner espoir.
Des ouvertures théologiques…

(Schéma du mouvement circulaire qui unit les trois personnes, p. 54)

Roublev a délibérément choisi le mouvement circulaire dans les personnages. Les regards de chacun des trois anges, le jeu de leurs mains, l’inclination de leur tête respective, tout cela exprime manifestement une communion extraordinaire entre eux car dans sa foi, Roublev a voulu montrer visuellement cette communion intense entre les personnes divines, cette sorte de communication silencieuse certes mais si expressive. Les trois personnages échangent, se livrent, s’épanchent l’une dans l’autre ; on pourrait presque dire à leur sujet qu’elles tiennent colloque.
Roublev a pensé à leur similitude, à leur unité totale : les trois hypostases ne font qu’un… Mais il a songé aussi à leur communion interne, périchorèse dans la théologie grecque et circumincession dans la théologie latine. Car la théologie en général considère la Trinité de deux manières : ad intra, à l’intérieur d’elle-même ; elle contemple ce que font ou ce que sont les trois personnes ; elles vivent en totale communion… ad extra, à l’extérieur d’elle-même, à l’égard du monde, envers les hommes.

Au centre de tout : la coupe

(Schéma p. 58)

Quel est le centre du mouvement circulaire décrit ci-dessus ? La coupe. Les trois personnes l’entourent et en plus elle se trouve au cœur d’une coupe plus vaste que forment les deux anges latéraux depuis leur tête jusqu’à leurs pieds. Le sujet de leur colloque ne peut être que la coupe. Tel que Roublev nous la présente, le mystère de la Trinité dans son mouvement ad extra est tout entier suspendu au mystère de cette coupe. C’est de toute évidence une coupe eucharistique. Posée sur un autel (car cette table est un autel), peinte sur une iconostase derrière lequel se déroule la divine liturgie, près des portes royales qui donnent accès au sacrifice eucharistique, cette coupe ne peut avoir d’autre sens. Réunis autour d’elle, c’est à son sujet que les trois personnes divines, venues chez Abraham, tiennent colloque.
Mais pour aller plus avant dans ce colloque, il est nécessaire de savoir, au préalable, qui, parmi elles est le Père, qui est le Fils, qui est l’Esprit Saint.

3ème partie : LES TROIS ANGES

Des opinions divergentes sur l’identification des personnages…

N. Grescny : Comment parler des trois hypostases, des trois personnes divines ? Je ne sais pas. Notre vocabulaire est toujours nécessairement inadéquat.

Le P. Assémat : Qui donc « symbolise » chacun des trois anges, par rapport aux trois personnes de la Trinité ?

N. Greschny : Les interprétations sont diverses, mais il y en a trois principales.

Pour les uns, l’ange central figure le Père, encadré du Fils à sa droite, et de l’Esprit Saint à sa gauche. Parmi les tenants de cette opinion, on trouve un homme aussi compétent que Paul Evdokimov et quelqu’un comme Louis Réau, le très grand spécialiste de l’art chrétien.

Pour d’autres, il faut regarder les personnages de gauche à droite dans l’ordre rigoureux du Credo : Père, Fils, Esprit-Saint.

Une tradition familiale…

Je respecte les deux opinions dont je viens de parler, mais pour ma famille des raskolniks (vieux croyants) l’ange central est le Père ; l’ange à sa droite (donc à notre gauche) est l’Esprit ; l’ange à sa gauche (donc à notre droite) est le Fils.

Parmi les symboles : le rocher…

Tout d’abord regardons le haut de l’icône ou se trouvent la maison, l’arbre et la montagne. Ils rappellent le chêne de Mambré, la tente d’Abraham, la montagne au pied de laquelle se déroule le scène. Mais ici ils n’ont été retenus que comme symboles.

Regardez la montagne : drôle de montagne en vérité. Elle est peinte selon le modèle stéréotypé, semblable à des boîtes que l’on aurait empilées les unes sur les autres. En plus elle a la forme d’une grande vague, en mouvement vers notre gauche. C’est le grand rocher de Daniel. A propos d’un songe de Nabuchodonosor, le prophète Daniel nous parle d’un rocher qui se détache, frappe une immense statue, symbole des quatre empires du mal, et devient une grande montagne qui remplit l’Univers. Ce rocher désigne un être divin qui vient instaurer un nouveau royaume à la place des anciens qu’il aura détruits. Ce rocher dans toute la tradition, c’est le Messie, c’est le Christ, le Fils de Dieu.

P. Assémat : « Ce rocher était le Christ » dit aussi Saint Paul, bien que dans un contexte différent à propos de Moïse frappant le roc dans le désert.

N. Greschny : oui, le rocher étant le symbole du Christ, l’ange qui se trouve au-dessous de lui est manifestement désigné comme le Fils, celui qui prendra chair pour devenir le Christ.

Le bâtiment et l’arbre.

P. Assémat : Votre argumentation est lumineuse mais vous savez que vous allez à l’encontre de traditions qui dans leur ensemble ne voient jamais là, à droite, le Fils. On le reconnait plutôt à gauche sous l’Eglise, Eglise du Christ.

N. Greschny : oui, le bâtiment à gauche désigne effectivement l’Eglise. Mais quand Saint Paul parle d’elle, il ne dit jamais qu’elle est le temple du Christ. Il dit bien qu’elle est le corps du Christ. Mais il affirme surtout que l’Eglise est le temple de l’Esprit…Ce symbole de l’Eglise désigne donc l’ange de gauche comme l’Esprit.
Quant à l’arbre c’est l’arbre de la vie, l’arbre de la création, d’un vert très sombre. Et c’est toujours le Père qui est considéré comme le Créateur.. L’ange du milieu est bien le Père. Cet ange est celui qui attire en premier l’attention. Dans la théologie orientale et occidentale même si on admet l’égalité entre les personnes, l’on accorde une certaine préséance au Père ; il est toujours nommé le premier ; il est considéré comme source de la vie ; le credo lui attribue la création ; il ajoute que le Fils est né de Lui, que l’Esprit procède de Lui… Celui qui dans l’icône a manifestement la prééminence ne peut à mon avis que désigner le Père.

A propos des couleurs…

Bien d’autres arguments suffisent à désigner le Père, par exemple les couleurs. Il est vêtu d’une tunique rouge pourpre et d’un manteau bleu comme les grands dignitaires impériaux, avec cette bande jaune, le claviculum, qui est leur insigne.

Prenons l’ange de droite : il est vêtu d’une tunique bleu (comme le manteau du Père) et d’un manteau d’un vert très doux, mais franchement vert. Le bleu symbolise la sagesse, le vert la nature. Il s’agit donc de la Sagesse Incarnée, c’est-à-dire du Verbe, la deuxième personne de la Trinité.

Passons à l’ange de gauche : pouvez-vous m’indiquer la couleur de ses vêtements ? C’est impossible. Car ils reflètent en réalité une multitude de couleurs : du bleu, du rouge, de l’ocre jaune, des teintes irisantes, nacrées… « L’Esprit souffle où il veut » dit l’Evangile ; il ne peut être limité, contenu, déterminé par tel signe. Il n’a pas d’attribution définie sur le plan des couleurs.

Des éléments de critique externe…

P.Assémat : Au point où nous en sommes, je ne puis m’empêcher d’établir une comparaison entre votre hypothèse et celle de Paul Evdokimov. Ce dernier s’appuie sur un texte pour affirmer que le Fils est l’ange de gauche et non pas l’ange de droite.

N. Greschny : Je connais ce texte : il relate comment une ambassade fut envoyée par le grand prince de Moscou à un Khan de Caucase. Hélas ! C’était un fait courant ; les Russes durent longtemps payer tribut à leurs oppresseurs et faire acte d’allégeance à leur égard.
Cette ambassade porte, parmi d’autres présents, une reproduction de la « Trinité » de Roublev sur laquelle justement, contrairement à ce qui se passe pour l’original, chacune des personnes est désignée en langue tartare.

P. Assémat : Si la reproduction est fidèle, nous avons la clef de toutes nos recherches.

N. Greschny : C’est évident. Le texte qui raconte l’ambassade affirme que le Fils se trouve à gauche.

P. Assémat : C’est bien en effet ce que reprend Evdokimov.

N. Greschny : J’avoue que la position d’Evdokimov m’étonne beaucoup. Il a commis, à mon avis, une très grosse méprise. Un homme qui connaît l’art de l’icône sait très bien que l’on considère une icône comme un sujet : quand on parle de sa droite il s’agit toujours de la droite de l’icône, c’est-à-dire de notre gauche. Quand on parle de la gauche de l’icône, il s’agit de notre droite.
Ce texte, loin de me contredire, vient au contraire appuyer mon analyse : le personnage à gauche de l’icône, c’est-à-dire donc à notre droite, désigne le Fils. C’est bien ce que j’essaie d’expliquer.

Un argument déterminant

C’est le contenu de la coupe eucharistique. Au dire de ma famille, le personnage de droite se mire dans le vin de son sang de cette coupe et, à sa surface apparaissent les traits de son Visage, de sa Sainte Face.

P. Assémat : S’il en est ainsi, si la coupe contient une Sainte Face tournée vers la droite, je comprends en effet pourquoi votre famille voit dans cet ange, la personne du Fils… Mais il faut le prouver.

Le problème de la restauration de l’icône…

P. Assémat : On ne voit pas très clairement ce qui est dessiné dans cette coupe.

N. Greschny : C’est exact. Car cette icône a subi de nombreuses restaurations qui cachaient l’original. Ce n’est qu’en 1926 que toutes les couches postérieures ayant été enlevées on est ainsi arrivé à l’œuvre même de Roublev.

Le contenu de la coupe…

J’ai fait agrandir et j’au scruté la grande reproduction de très bonne qualité, établie en Union Soviétique et je peux dire que, malgré que quelques petits fragments soient tombés le reste est suffisamment clair pour confirmer ce que disait ma famille : c’est une « Sainte Face » qui est peinte dans la coupe, reflétant le visage de l’ange de droite qui n’est autre, par le fait même, que le Fils.

4ème partie : L’OBJET DU COLLOQUE

La « Sainte Face » ou « Mandylion »

P. Assémat : Pouvez-vous nous donner des explications sur cette Sainte Face ?

N. Greschny : il y a deux légendes, occidentale et orientale, où il s’agit de l’impression de visage du Christ sur une étoffe. L’une parle de Véronique. Dans le culte catholique du chemin de la Croix, elle est une femme qui voulut essuyer le visage de Jésus. En retirant le voile dont elle se servait, elle s’aperçut que le visage du Seigneur avait été comme imprimé sur l’étoffe.
Chez nous le roi d’Edesse, Abgar, malade de la lèpre et apprenant la puissance de Jésus, lui dépêcha une ambassade pour le prier de venir le guérir. Pour toute réponse, le Christ s’étant lavé, épongea son visage. Comme ses traits s’étaient aussitôt fixés sur le linge qu’il avait utilisé, il donna ce tissu à l’ambassadeur du roi d’Edesse, pour qu’il le porte à Abgar. Dès que celui-ci le reçut il fut guéri. La légende orientale révèle un fait historique. On voyait à Edesse « quelque chose » sur quoi était présent le visage du Christ. A mon avis il s’agissait du fameux linceul de Turin (linge funéraire qui enveloppa le cadavre de Jésus. Tout le corps de Jésus y compris sa face s’est miraculeusement « imprimé » en négatif sur la toile sans déformation aucune, malgré les plis du linge, au moment même de Sa résurrection). Le linceul fut transporté à Constantinople en 944 où on l’exposait de temps en temps, plié de multiples fois, pour présenter que le visage, comme on le fit par la suite dans la capitale de l’empire byzantin.

P. Assémat : Je pensais que le mandylion était une icône.

N. Greschny : Vous n’avez pas tort. Car la vue de ce visage si impressionnant inspira les peintres, qui reproduisirent sur leurs icônes la tête du Christ avec des traits tirés de l’image (tout cela a été analysé)… si bien qu’il y eut une sorte de portrait « officiel » du Christ, avec cheveux longs, barbe, etc. qui s’est perpétué jusqu’à nous.
Le premier visage du Christ sur le linceul, c’est la première image de Lui non faite par la main de l’homme… Les icônes n’ont cessé de le reproduire de multiples façons.

P. Assémat : Qu’est-ce donc au juste que cette « Sainte Face ? »

N. Greschny : Le sujet de cette Sainte Face, c’est uniquement le visage du Christ, douloureux et glorieux à la fois. Glorieux parce que pour nous, aujourd’hui, on ne peut représenter le Christ que vivant, rayonnant de splendeur ; douloureux parce que le point de départ, c’est son visage ensanglanté, meurtri, pratiquement tel, que vous le représentez sur le suaire de Véronique.

P. Assémat : Le linge de Véronique en Occident comme le mandylion en Orient renvoient donc tous les deux au mystère de la passion du Christ ?

N. Greschny : Tout à fait, même si ce visage est glorieux chez nous. Et l’expression « Sainte Face » jouit pratiquement du même sens dans les deux traditions.

Le descendant d’Abraham…

P. Assémat : Pour revenir à la coupe de la « Trinité » de Roublev, en montrant qu’elle contient la sainte Face du Christ, vous affirmez par le fait même qu’elle évoque sa passion.

N. Greschny : « Evocation de la Passion » et « Sainte Face » pour nous c’est la même chose.

Et vous comprenez tout de suite ce que l’on peut lire sur l’icône de la « Trinité ». Le personnage de (notre) droite, le Fils, se mire dans la coupe ; il y voit sa face ; il perçoit déjà tout le mystère de la Croix.

P. Assémat : Et les deux autres personnages avec lui…

N. Greschny : Il faut reprendre le sens de la scène entière. Les trois personnages sont venus rendre visite à Abraham pour lui parler de ce qui le préoccupe. Il n’a pas de fils. Il en espère toujours un, car il lui a été promis qu’il aurait des descendants aussi nombreux que les grains de sable du rivage ou les étoiles du ciel. Mais il n’en a toujours pas et il prend de l’âge ainsi que sa femme…
Les trois personnages viennent lui annoncer un descendant l’an prochain.

N. Greschny : Son fils Isaac.

N. Greschny : Plus qu’Isaac, infiniment plus qu’Isaac. Il faut écouter saint Paul là-dessus : lorsque Dieu promit un fils à Abraham, il lui parla d’un descendant ; il ne parla pas de « descendants » au pluriel, mais de «descendant » au singulier. Car ce descendant était le Christ.

« Il n’est pas dit : aux descendances, comme s’il s’agissait de plusieurs, mais c’est d’une seule qu’il s’agit : à ta descendance c’est-à-dire au Christ » (Galates 3 / 16)

P. Assémat : Les trois personnes viennent donc annoncer à Abraham et à travers lui à l’humanité, ma naissance du Christ.

N. Greschny : La naissance du Christ qui viendra sauver tous les hommes, ce Christ qui est le Verbe, le Fils, celui que nous voyons sur l’icône à notre droite. C’est Lui qui sera envoyé, c’est Lui qui nous sauvera.
Voilà de quoi s’entretiennent les trois personnes. Mais en annonçant le salut, elles parlent de la façon dont il se réalisera, par la passion du Fils, qui déjà devine sa destinée dans la coupe. Pour assurer ce salut Il devra connaître la croix.

Regardez le Fils, à droite, la tête penchée vers la coupe, le visage grave. Il accepte d’avance sa mission douloureuse, la main droite abaissée manifestant ce mystère de son consentement.

Le Père et l’Esprit

P. Assémat : Et les deux autres personnages parlent de lui…

N. Greschny : Le Père, au centre, est tourné vers lui. Regardez la façon dont il est assis ; seule la tête penche à sa droite ; tout son corps va vers le Fils, le Fils bien-aimé, en qui il se complaît, comme le dit plusieurs fois l’Evangéliste. C’est le Fils qu’il a engendré de toute éternité et qu’il envoie parmi les hommes. Combien de fois, le Christ parlera du Père comme de celui qui l’a envoyé.

P. Assémat : Et comment interprétez-vous la tête penchée vers l’Esprit ?

N. Greschny : Tout en étant tout entier au Fils, le Père est aussi tout entier à l’Esprit comme pour lui donner un rôle : c’est lui qui guidera le Fils tout au long de sa vie humaine et qui l’assistera plus particulièrement dans sa mission crucifiante. Voyez d’ailleurs comment l’Esprit le regarde, dans une attitude ferme, droit ; il le soutiendra. Comme ce regard est à la fois plein de bonté et d’assurance .

Ici encore combien de fois nous entendrons le Christ dans l’Evangile parler de cette aide de l’Esprit : il le dira de multiples manières, par exemple en citant Isaïe : « l’Esprit de Dieu repose sur moi ; l’Esprit de Dieu m’a envoyé ».

P. Assémat : Le Père et l’Esprit ont chacun leur main droite dirigée vers le Fils ou vers la coupe, ce qui, je suppose, revient au même. Serait-ce une confirmation de ce que vous dites ?

N. Greschny : Il faut peut-être expliquer la position de ces mains et plus encore des doigts, notamment de l’index et du majeur.
D’ordinaire ce geste de la main droite est le geste par excellence du Christ, du Christ Pantocrator par exemple ; vous pouvez l’observer sur quantité d’icônes ; la main est alors levée, la paume tournée vers nous. C’est un geste de bénédiction « au nom du Seigneur ».

Le geste des deux mains droites…

(p. 94-95)

P. Assémat : Chacun des doigts est disposé d’une manière particulière.

N. Greschny : Ils veulent signifier effectivement « le nom du Seigneur ».
Le nom du Seigneur, c’est Jesus Christos, soit IC et XC en grec. L’index droit et le majeur incurvé forment I et C ; l’annuaire et le pouce se croisent pour former un X du moins en principe, car souvent on se contente de les joindre ; l’auriculaire légèrement courbé forme le C final.

C’est donc la position d’une main qui bénit au nom de Jésus Christ. C’est pourquoi les évêques en Occident l’ont adopté… et c’est aussi de cette manière que les vieux croyants tracent sur eux le signe de la Croix.

P. Assémat : Ce n’est pas ce geste qui est dépeint ici ?

N. Greschny : C’est bien celui-là sans aucun doute. Vous apercevez la main non pas du côté de la paume mais du côté du dos. C’est la raison pour laquelle on ne voit pas le pouce. Mais on perçoit très bien l’index et le majeur et l’on devine, recourbés, les deux derniers doigts.

P. Assémat : Que font exactement le Père et l’Esprit ?

N. Greschny : On ne peut affirmer ici qu’ils bénissent mais ils désignent le Fils en indiquant son nom de leur main droite. Ce geste de désignation est très fréquent. Roublev par exemple s’en sert dans maintes circonstances ; regardez l’évangéliste Matthieu dans le jugement dernier de Vladimir. De sa main droite, il désigne son évangile de Jésus Christ. (p. 120)
Mais les deux anges font plus que désigner le Christ de leur main droite. Ils sont garants de sa mission. Ils portent témoignage de lui.
C’est ce qu’il dira lui-même : « Le Père qui m’a envoyé me rend témoignage » (Jean 8/18). « Lorsque viendra le Paraclet l’Esprit de Vérité qui procède du Père, il rendra lui-même témoignage de moi. (Jean 15/26).

La conjonction des trois mystères…
P. Assémat : Les trois grands mystères chrétiens, ceux de la Trinité, de l’Incarnation, de la Rédemption, c’est-à-dire les sujets les plus élevés de la pensée humaine sur Dieu sont en quelque sorte condensés en cette icône.

N. Greschny : Les trois anges sont venus comme des pèlerins auprès d’Abraham (le bâton qu’ils tiennent à la main nous le rappelle). Ils parlent ; ils expriment un mystère ; ils vont repartir. Mais Roublev fixe ce moment-intemporel-unique-éternel- où la Trinité se dit elle-même, en parlant de l’Incarnation du Fils et, au-delà, de son œuvre de Rédemption.
Cette icône est d’une pénétration théologique qu’on n’arrivera pas à épuiser.

Un Dieu qui veut partager la souffrance humaine…

P. Assémat : Au fond Roublev nous montre les trois personnes divines non pas occupées d’elles-mêmes mais soucieuses de l’homme, dans ce que vous appeliez leur œuvre ad extra.

N. Greschny : Roublev montre un Dieu serviteur de l’homme, un Dieu compatissant à l’infini. Le Fils sera envoyé non pas pour enlever ou supprimer la souffrance d’un coup de baguette magique, ne rêvons pas… mais pour la vivre, l’assumer ; non pas pour exterminer les violents mais pour se mettre du côté des opprimés et prendre sur Lui leurs douleurs.
La coupe sur la table est au cœur des trois anges. Mais cette table est ouverte du côté des spectateurs, de notre côté, comme si la coupe nous était offerte.

Il faut prendre la coupe pour entrer dans le mystère de Dieu.

Dans l’ordre de la spiritualité…

P. Assémat : Roublev parlait du mystère eucharistique, de cette messe qui est le cœur de la vie chrétienne… comme pour déclarer qu’on ne comprend pas Dieu qu’en prenant la coupe. Jésus dit « Si vous ne buvez le sang du Fils de l’Homme vous n’aurez pas la vie en vous », c’est-à- dire vous n’aurez pas de part avec moi ni avec le Père, vous ne saurez pas me rencontrer, me comprendre. Tout cela peut être rattaché à l’icône. La gloire du Christ est liée à sa passion. C’est lorsque Jésus parlait de sa mort et de sa passion à Jérusalem, nous dit Luc, qu’il fut transfiguré sur la montagne devant Pierre, Jacques et Jean.

N. Greschny : Je crois qu’en contemplant cette icône on est amené à méditer sur de multiples thèmes de la théologie, autant d’ailleurs de la théologie occidentale que de la théologie orientale.

5ème partie : RESONANCES THEOLOGIQUES

Un autel romain…

N. Greschny : Les trois anges sont disposés autour d’un autel romain. Manifestement ce n’est pas un autel oriental ; chez nous, de façon générale, l’autel est une simple table, de modeste dimension. L’ouverture que l’on voit sur le devant de l’autel est typique de l’autel romain. C’est la fameuse « fenestrella confessionnis »- une cavité munie parfois d’une grille par laquelle on pouvait voir les reliques d’un saint. Je trouve tout à fait étrange que, pour sa « Trinité », Roublev ait choisi un tel autel. Nous avons là une preuve flagrante qu’il connaît l’Occident. Pour moi, il unit pensée latine et pensée grecque jusque sur son icône.

Une époque d’intenses discussions théologiques…

N. Greschny : Occidentaux et orientaux ont une théologie différente sur le dogme du mystère de la Trinité. Les orientaux s’en tiennent au Credo défini aux conciles de Nicée et de Constantinople : « L’Esprit procède du Père ». Les occidentaux ont peu à peu introduit dans ce Credo une formule nouvelle, le fameux « filioque », que Rome a finalement accepté : « L’Esprit procède du Père et du Fils ».
Pendant des siècles les deux courants de pensée ont été admis sans que les différences posent des problèmes. Il en fut tout autrement après la séparation des deux églises qui se mirent alors (je résume, bien sûr) à se traiter mutuellement d’hérétiques, au point de ne retenir strictement que leur formule sur la Trinité, prenant bien soin de ne pas accepter celle de l’adversaire ou même de l’ignorer totalement.
L’intense discussion à ce sujet à aboutit au concile de Florence en 1439, concile aux suites malheureusement éphémères. Roublev était sûrement au courant de la pensée occidentale sur ce mystère.

Des sensibilités théologiques diverses…

Roublev a su intégrer dans sa méditation les deux positions orientale et occidentale. On peut y faire deux lectures, l’occidentale et l’orientale, du dogme de la Trinité. Elles rendent compte de toutes les définitions dogmatiques.
« L’Esprit procède du Père », comme du Principe Premier, de la Source, disent les orientaux : le Père au centre, personnage apparemment le plus important, porte ses regards vers l’Esprit, comme s’il se donnait à lui. L’Esprit tient tout de Lui.
« L’Esprit procède du Père et du Fils », disent les Occidentaux : regardez le visage du Père et celui du Fils à droite, leur manière d’être assis, leur inclination ; ils sont tous deux tournés vers la gauche, vers l’Esprit.
« L’Esprit procède du Père par le Fils », c’est la formule qui rallie pratiquement occidentaux et orientaux. Le Père se porte vers l’Esprit mais en même temps par sa main droite et par l’ensemble de son attitude, il englobe le Fils à droite, il passe par lui pour se donner à l’Esprit.
Toutes les sensibilités théologiques sont respectées ; aucun théologien, de quelque bord qu’il soit, ne saurait être froissé à la vue de cette icône.
Nulle part et à aucune époque de l’Eglise, l’on ne trouve une méditation aussi dense sur le mystère de la Trinité. Par l’harmonie des lignes, par les couleurs, par le mouvement des têtes, par l’orientation des regards, par le jeu des mains, Roublev traduit en un tableau d’une simplicité déconcertante, ce que tous les livres de théologie n’ont jamais pu exprimer.

6ème partie : HARMONIQUES SPIRITUELLES…

Dernières impressions…

N. Greschny : l’icône de la « Trinité » d’André Roublev est une œuvre admirable. Que l’on tienne compte des formes, que l’on considère l’harmonie des couleurs, que l’on soit sensible à la structure de la composition, tout nous émerveille. L’icône de la «Trinité » est une œuvre d’art incomparable. Et pourtant ce n’est pas comme telle qu’il faut la regarder. Elle est avant tout, dans l’esprit de Roublev, une œuvre religieuse ; plus encore que toute icône, à cause de son degré d’élévation, c’est un objet de piété que l’on se doit d’approcher dans la foi. Serge de Radonèje disait souvent qu’il faut « Vaincre la déchirante division de ce monde par la contemplation de la Très Sainte Trinité ».

Un message… :

Cette union entre les trois anges, cette communion intense entre eux, ce colloque incessant qu’ils tiennent dans l’Amour, voilà le plus haut sujet de contemplation pour les hommes.
Nous faisons l’expérience quotidienne de nos séparations, de nos divisions, entre individus, entre groupes, entre nations… Roublev nous met devant les yeux ce mystère d’unité de la Trinité auquel nous sommes conviés à participer. C’est à la destinée même de l’humanité que nous méditons devant cette icône.
L’icône nous parle d’une part du dialogue, de la communion, entre les trois personnes, et d’autre part de l’engagement de Dieu Trinité dans la passion du Fils. Lors des nombreuses restaurations de l’icône l’intérieur de la coupe avait été garni de plusieurs peintures représentant tantôt l’Agneau immolé, tantôt une grappe de raisin, mais toutes ces interprétations faisaient nettement allusion à la passion du Christ. La contemplation des Trois autour de la coupe doit nous introduire à la plus haute méditation. C’est dans la foi et dans la foi seulement que l’on pénètre la profondeur de cette icône. Un non croyant peut en saisir la beauté et la grandeur ; seul un croyant peut entrer dans son mystère. C’est le cas de redire, comme le Christ : « Heureux ceux qui voient ce que vous voyez ».

P. Assémat : Voulez-vous dire que finalement cette icône doit nous faire accéder à la prière ?

N. Greschny : Je le pense. C’est son unique but. C’est la plus haute prière que Roublev nous introduit. C’est, plus que son art, ce qui fait l’incomparable splendeur de cette icône.

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Une poésie

T’AIMER

T’aimer, Seigneur, tout simplement T’aimer ..

Ô, quel délice, quelle félicité !

T’aimer infiniment, T’aimer profondément

Malgré ce monde chancelant.

T’aimer sur des chemins tordus,

T’aimer dans les déserts perdus,

T’aimer obstinément et sans retour ,

T’aimer et s’adonner à Ton Amour,

T’aimer, toujours T’aimer, mon Dieu,

Ô, mon mystère lumineux !

T’aimer sans cesse, sans répit,

Dans la souffrance, dans l’oubli,

T’aimer, T’aimer jusqu’à la lie,

T’aimer sur terre et au Paradis,

T’aimer, T’aimer et tout est dit,

T’aimer et tout est consommé..